Connaissez-vous « I Wheel Share » ? Il s’agit d’une nouvelle plate-forme rassemblant les témoignages de situation choquantes vécues par des personnes en situation de handicap moteur. Mais ce n’est pas tout ! Découvrez davantage ce projet, avec Audrey Sovignet, sa créatrice.
Audrey, quand et comment vous est venue l’idée de créer l’application « I Wheel Share » ?
Mon frère est devenu paraplégique il y a deux ans maintenant suite à un accident de moto. De mon côté, l’idée a émergé en janvier 2014, alors qu’il venait justement de vivre une série de situations parfois drôles et parfois choquantes. Là, il avait vécu une véritable situation de blocage en voulant aller en boîte de nuit. L’entrée lui a été refusée sous prétexte qu’il serait un danger pour lui, mais aussi pour les autres. En entendant ça je n’ai pas pu rester les bras croisés. Je suis allée sur le net, à la recherche de témoignages similaires à celui de mon frère. J’en ai trouvé beaucoup, mais parsemés à droite et à gauche sur la toile. J’ai pensé qu’il fallait les rassembler sur un seul et même support pour avoir une meilleure force de frappe.
Pourquoi une application ?
Tout simplement du fait de mon expérience. À l’origine je suis graphiste et à l’époque je suivais également une formation de programmation. La création d’une application mobile m’est apparue comme une évidence. Le nom « I Wheel Share » également d’ailleurs… Il nous est venu en moins de 24h. Nous avons utilisé un jeu de mot anglophone entre « wheelchair » qui signifie « fauteuil roulant » et « share », partager.
Comment fonctionne l’application ?
Tout d’abord, on arrive sur une carte de géolocalisation. Il suffit de cliquer dessus pour lire les témoignages recueillis dans telle région ou telle ville. Pour raconter sa propre histoire, il n’y a qu’à se créer un compte (c’est très rapide!) et ajouter son récit. En dessous de chaque témoignage, un « +1 » apparaît. Un utilisateur ayant lui-même vécu une histoire similaire peut ainsi le stipuler en cliquant dessus. Au bout d’un certain nombre de « +1 », un message est automatiquement envoyé à la municipalité dans laquelle la situation s’est produite. Nous ne faisons pas ça pour dénoncer, mais simplement pour faire remonter les informations à la ville. Autre fonctionnalité disponible : les utilisateurs peuvent se suivre entre eux. « I Wheel Share » est donc aussi, un petit réseau social !
Seules les personnes handicapées peuvent interagir ?
Non bien au contraire. Nous encourageons les personnes valides à participer. D’ailleurs, nous nous sommes rendu compte que les mamans et leurs poussettes rencontraient les mêmes problèmes que les personnes en fauteuil !
Où peut-on trouver l’application ?
Elle est en cours de développement et sera donc disponible sur Android début 2015. Du coup, en ce moment, nous cherchons activement des « béta testeurs » pour obtenir des retours sur « I Wheel Share ». Les volontaires, peuvent me contacter via facebook ou sur contact@iwheelshare.com. Sinon, pour l’instant, les différents témoignages sont recueillis via notre site internet.
Faites-vous également des actions « terrain » ?
Oui tout à fait. En octobre dernier par exemple, nous nous sommes rendus à Sainté Street, un festival adressé aux personnes pratiquant des activités en skatepark. Mon frère fait du WCMX (Wheelchair MotoCross), c’est-à-dire qu’il skate avec son fauteuil. Dans d’autres pays comme l’Allemagne, cette discipline est mise en avant, mais en France… rien ! Lors d’une compétition du Sainté Street, il y avait 3 personnes en fauteuil dont mon frère, ainsi qu’un nancéien unijambiste équipé d’une prothèse. Ce nancéien est arrivé 4ème ! Par notre présence sur le terrain, nous souhaitons réduire la distance entre personnes valides et personnes handicapées.
Vous évoquez une collaboration avec Carrot’Mob, une association qui prêche le buycott ?
Oui, nous proposons aux commerçants d’organiser des événements anti-boycott. Cela consiste à mobiliser des gens au sein de leur commerce et donc de promouvoir leur activité. En échange, le propriétaire des lieux s’engage à réinjecter l’argent récolté dans des accessoires liés à l’accessibilité : une rampe par exemple. Nous ne pouvons pas financer des travaux d’aménagement globaux via un seul événement, cependant ces actions nous permettent de tendre la main aux commerçants qui se sentent démunis face à la loi sur l’accessibilité des ERP.
Avez-vous d’autres projets dans le « pipe » ?
Oui encore un ! Nous souhaitons lancer une place de marché sur laquelle seront rassemblés un certain nombre de produits liés au handicap. Nous privilégions les produits étant dans un axe de positivité : des prothèses customisables par des artistes, des articles liés à la sensualité, des séjours adaptés, etc. Et pour le côté « exclu », nous venons d’apprendre que nous sommes les heureux gagnants du concours e-commerce E-wards. La récompense est le développement d’une plate-forme marchande. Notre place de marché devrait donc être lancée plus vite que prévu !
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